2 mai 2018

Comment demander des subventions pour son projet culturel ?

Comment demander des subventions pour son projet culturel ?

Vous avez un super projet culturel mais vous ne savez pas par où commencer pour chercher des partenaires, notamment financiers ? Les dossiers de subventions peuvent parfois faire peur, mais ils ne sont pas insurmontables. Voici quelques conseils que j’ai pu rassembler après plusieurs années à monter des dossiers, pour vous aider à entamer vos démarches. Cet article n'a pas vocation à être exhaustif. N'hésitez pas à compléter en commentaire si vous avez d'autres conseils à proposer !

Pour pouvoir présenter votre projet aux subventionneureuses (et autres partenaires), il est nécessaire de l’avoir pensé et rédigé. Même si tout n’est pas définitif, qu’il est susceptible d’être modifié dans les mois qui arrivent, il faut rédiger une base. Cette base vous permet de mieux cerner votre projet, mais aussi de savoir à qui demander des subventions.

Ne pensez pas seulement à ce que vous voulez dire sur votre projet, mais aussi – et surtout – à ce que celleux qui vont recevoir votre dossier veulent savoir.

Allez, c’est parti !

Rihanna disant « We gettin’ money » / « On se fait du fric ».

#1 Présenter la structure porteuse

Voici quelques pistes pour rédiger votre dossier de présentation :

  • Parlez de l’historique : quand votre structure est-elle née ? Quelle forme a-t-elle ?
  • Présentez les missions de votre association, ses particularités.
  • Avez-vous déjà monté des projets ? Établissez un historique (s’il a lieu d’être) des actions passées, incluant les partenaires qui les avaient soutenues.
  • Parlez aussi du nombre d’employé·es, de bénévoles, de toutes les personnes qui font que votre association et votre projet existent.

N’oubliez pas aussi de mentionner vos partenaires (pas seulement financiers) ; en général, les subventionneureuses n’aiment pas être seul·es partenaires d’une action, notamment financièrement, il faut penser à diversifier. Et si les partenariats ne sont pas encore fixés, vous pouvez tout de même indiquer ceux que vous envisagez. Attention cependant à comment vous les indiquez, que cela ne soit pas mensonger.

#2 Présenter le projet

Parlez du fond de votre projet, de ce qui le constitue, mais aussi des partenaires potentiels, des lieux, de la temporalité (quand aura-t-il lieu, pendant combien de temps, une récurrence est-elle prévue ?), des différentes actions qui peuvent le composer. N’oubliez pas de mentionner la communication qui sera faite autour, si elle sera locale, nationale, internationale et comment elle sera réalisée (mailing, flyers, affiche, captation vidéo, etc.).

Il est aussi nécessaire de parler des objectifs de votre projet. À quels besoins répond-il sur le territoire où il aura lieu ? À qui s’adresse-t-il ? Qui seront les publics et les bénéficiaires de l’action ? S’inscrit-il dans des projets plus généraux ?

Parlez de comment vous avez identifié ces objectifs : s’agit-il d’un diagnostic de territoire (analyse des besoins existants et des solutions déjà présentes ou non) mené avec d’autres partenaires, une réponse à une étude, ou des choses que vous avez constaté vous-mêmes ?

Et enfin, expliquez comment vous comptez atteindre ces objectifs, et évaluer ensuite s’ils l’ont bien été. N’oubliez pas de mentionner ce que votre projet apporte à d’autres, en faisant rayonner le territoire, en travaillant sur le lien social entre les gens, en apportant du dynamisme, etc.

Il est important de montrer comment votre projet se démarque, pourquoi il est unique et important, en somme pourquoi il est indispensable de le soutenir.

Moi quand je reçois un courrier positif de notification de subvention, vue d’artiste.
(description de l’image : gif de Céline Dion recevant un Billboard Award)

#3 Présenter un planning et un budget concret

Vous allez souvent devoir présenter votre projet 1 ou 2 ans, voire plus, avant sa réalisation (j’en présente parfois 4 ou 5 ans à l’avance !).

Même si certaines dates peuvent encore être seulement indicatives, il est nécessaire de donner des précisions sur la temporalité de l’action. Quand commence-t-elle, sous quel format, quelles sont les différentes périodes d’action, combien de temps durera-t-elle ?

C’est la même chose pour le budget. Le planning et le budget sont des documents prévisionnels et peuvent donc tout à fait bouger selon les contraintes qui seront les vôtres. Il est cependant nécessaire d’avoir une base sur laquelle s’appuyer.

Si vous n’avez jamais rédigé de budget, n’hésitez pas à demander de l’aide à des personnes compétentes de votre entourage ou à regarder les ressources disponibles sur internet, vous en trouverez quelques-unes à la fin de l’article.

Les tableaux fournis par les administrations ne sont pas forcément révélateurs ou pratiques pour toutes les actions ; je vous conseille donc d’avoir votre propre modèle, avec des infos détaillées, pour pouvoir ensuite les replacer facilement dans les différents documents-types que vous aurez à remplir.

Quand vous construisez votre budget, pensez bien à différencier ce qui constitue les rémunérations (salaires, charges sociales, honoraires, droits d’auteurices, etc.) du reste des dépenses (fournitures, locations, frais de déplacement ou de repas). C’est souvent la première catégorie que les subventionneureuses vont regarder, notamment sur des projets impliquant des intervenant·es professionel·les.

Dans la catégories des produits (donc de l’argent que vous recevez), indiquez les sommes demandées aux différent·es subventioneureuses, vos ressources propres (si elles existent, comme la billetterie, ou la vente de produits) et n’oubliez pas les cotisations à votre association ou les dons privés s’il y en a. Si les demandes de soutien sont encore en cours, indiquez-les comme telles, mais faites-les bien apparaître. Le budget prévisionnel que vous présentez est votre budget « idéal », vous pouvez en avoir un plus réaliste pour votre propre usage, prenant en compte moins de subventions reçues.

C-3P0, personnage de Star Wars, dansant de bonheur à l’idée de rédiger plein de tableaux de budget.

Pensez à prévoir des dépenses logiques et justifiables. On pourra vous demander ensuite de détailler pourquoi vous avez calculé ainsi votre budget. N’hésitez pas à avoir de votre côté un document plus complet que celui présenté aux subventionneureuses, qui vous donne énormément de détails sur le mode de calcul ; cela vous permettra, en plus d’avoir une estimation beaucoup plus juste de vos coûts, de mettre à jour le document plus facilement au fur et à mesure des dépenses pour voir où vous en êtes financièrement.

À la fin du projet, on vous demandera un bilan financier réalisé, prenant en compte toutes les dépenses faites et les produits reçus. Certain·es demandent même des bilans intermédiaires donc n’hésitez pas à mettre vos documents à jour de façon régulière. Sachez qu’il est aussi possible qu’on vous demande des copies des justificatifs de dépenses pour prouver que l’argent a bien été utilisé comme prévu. De toute façon, il vous faudra conserver ces justificatifs pour la comptabilité ; sachez juste qu’on peut vous en demander des copies.

#4 Identifier vos besoins

Avant de contacter un·e partenaire potentiel·le, il est nécessaire d’identifier ses besoins, et qui peut y répondre. Par exemple, vous montez un projet d’exposition, vous aurez besoin d’argent pour l’organisation de l’événement, mais aussi d’une salle, peut-être de partenariat au niveau de la nourriture pour le vernissage, mais aussi de moyens humains pour vous aider à installer et à mener à bien le projet sur sa durée.

Définir votre projet, c’est aussi définir ce qui est nécessaire pour le monter et ce qui vous manque. Certain·es partenaires ne pourront pas vous aider financièrement mais peuvent par exemple mettre des locaux à votre disposition, ou vous aider à trouver des partenaires au niveau local car iels ont un bon réseau.

N’hésitez pas à regarder comment d’autres projets ont été soutenus, et à demander directement à la structure quels types de soutiens elle peut apporter (sans pour autant arriver sans se renseigner sur elle au préalable). Pensez aussi à comment vous pouvez répondre aux besoins de ces structures. Comment votre action s’inscrit dans la leur, quel intérêt elles auraient à aider votre démarche. Un partenariat fonctionne dans les deux sens.

Il faut aussi être réaliste. Si les structures que vous allez rencontrer ne vous connaissent pas, que c’est votre premier projet, il sera souvent plus difficile d’obtenir des partenariats. Commencez cette recherche bien en amont de la réalisation du projet, et pensez à des solutions de secours si ce que vous aviez envisagé n’est au final pas possible.

#5 Ne pas oublier de réfléchir au calendrier

Il y a plusieurs choses à prendre en compte dans votre calendrier, au-delà du planning spécifique à l’action.

Tout d’abord, il est nécessaire de réfléchir au projet bien en amont. La plupart des subventions se demandent à l’année civile, et quelques mois en amont. Pour un projet en novembre 2019, il est donc possible d’avoir à rédiger son dossier en septembre 2018, et parfois même encore avant. Prenez bien ces délais en compte, ils sont tantôt de bien plus d’un an, tantôt seulement de quelques mois.

L’autre délai important est celui du versement de la subvention. Certain·es subventionneureuses versent l’aide en amont, certain·es une moitié avant et le solde après, et d’autres parfois deux ans après la fin de l’action. Ces délais peuvent entraîner de gros soucis de trésorerie et il faut donc y être préparé·es.

Il est aussi possible que la réponse d’engagement sur le projet arrive après, voire à la fin de celui-ci, il faut donc être capable de gérer l’éventualité d’un refus de dossier, et d’avoir donc moins de ressources que prévu.

Quand on pose un dossier, il faut donc se renseigner sur :

  • la période de lancement et de clôture de l’appel à projet / des dépôts de dossiers de subvention ;
  • la période des commissions d’attribution ;
  • la période de notification d’acceptation ou non de la subvention, c’est-à-dire de réception du document officiel faisant part de la décision ;
  • la période de versement de l’aide.

Certains dossiers sont aussi extrêmement longs à remplir, pensez donc bien à les regarder et les commencer en amont. Certains partenaires demandent par exemple une liste de documents complémentaires et de dossiers annexes longue comme la Chaîne des Puys.

Coucou c’est le dossier caché dans le dossier, surprise !
(description de l’image : gif d’un chien caché sous un autre chien et se révélant.)

#6 Parler de votre projet !

Une fois que votre projet est construit et votre dossier rédigé, parlez-en avec les partenaires potentiel·les. Une rencontre de vive voix sera un bel appui, une occasion d’en dire plus sur votre projet (souvent un dossier seul est un peu trop réducteur). C’est aussi un moyen de vous faire connaître auprès des collectivités, des professionel·les, etc. qui pourront être sollicité·es.

Un projet qui n’aura pas été défendu en rendez-vous aura moins de chances de rencontrer un soutien favorable. Vous pouvez vous entraîner au préalable à présenter votre projet à l’oral pour savoir comment agencer votre discours.

#7 À qui demander ?

Il existe énormément de pistes de soutien, mais il faut prendre conscience que chaque partenariat demandé représente du temps et de l’énergie. Mieux vaut donc sélectionner des partenaires précis et se focaliser dessus plutôt que d’en contacter des dizaines sans être capable de pouvoir assurer une réalisation de dossier et un suivi correct·es.

Tout d’abord, vous pouvez vous renseigner sur les aides accordées par les collectivités territoriales. Selon les endroits, leurs compétences varient, n’hésitez donc pas à vous renseigner dessus. Certaines communautés de communes ou d’agglomération par exemple vont être en charge de la culture, alors qu’à d’autres endroits elle restera à la compétence des municipalités. Il arrive aussi que cela soit partagé : par exemple une collectivité soutient les arts plastiques et l’autre le spectacle vivant. De manière générale, renseignez-vous sur les aides accordées à tous les niveaux : cantons, ville, communauté d’agglomération/de communes/métropole, conseil départemental, conseil régional, ministères (notamment au niveau des direction régionales comme la Direction Régionale des Affaires Culturelles ou DRAC ).

Vous avez souvent des organigrammes à disposition, qui peuvent vous indiquer quel·le agent·e est en charge de votre domaine d’activité. Si un document détaillé présentant les différentes aides n’est pas toujours disponible, iel pourra vous renseigner et vous aiguiller.

Il faut aussi partir du principe que parfois, avant de tomber sur la bonne personne, il vous faudra enchaîner plusieurs rendez-vous, et que cela peut prendre de longs mois. Il est aussi possible que votre projet soit transversal et recoupe donc les missions de plusieurs agent·es (par exemple un projet culturel sur des quartiers dits prioritaires, ou un projet d’exposition dans des structures de santé publique, un projet artistique en prison, etc.).

En dehors des collectivités, certains organismes soutiennent aussi des projets, comme les sociétés de gestion de droits (SPEDIDAM, ADAMI, SACEM) ou le DICRéAM pour la création artistique et numérique. Vous pouvez aussi retrouver de nombreux appels à projets (cf. ci-dessous).

Enfin, vous pouvez demander des aides à des entreprises et des particuliers, dans le cadre du mécénat ou du sponsoring.

Dans le cadre du mécénat, s’il n’est pas obligatoire, il est préférable d’avoir le rescrit fiscal mécénat vous autorisant officiellement à émettre des reçus donnant droit à des déductions d’impôt pour les personnes et entreprises réalisant des dons. Ces dons peuvent êtres monétaires, ou de marchandises (exemple : une boulangerie qui vous fournit des gâteaux pour un événement) ; il peut aussi s’agir d’une mise à disposition d’un·e salarié·e comme soutien humain à l’association. Tous ces dons sont encadrés par la loi, et peuvent donner lieux à des contreparties ne dépassant jamais 25 % de la valeur du don.

Certaines grandes entreprises ont des fondations dédiées à leur démarche de mécénat, parfois réalisant même des appels à projets. Pour les plus petites, certaines créent parfois des fonds de dotation locaux pour soutenir les projets, sinon, il faut démarcher soi-même. C’est un travail long et fastidieux, donc soyez-y préparé·es. Les premiers mécènes proviennent surtout des cercles proches de nous, pour les autres, il est plus compliqué de les atteindre. Sachez montrer aux mécènes pourquoi vous les avez choisi·es spécifiquement, pourquoi leur entreprise devrait être en lien avec votre projet.

Vous pouvez retrouver sur internet des annuaires regroupant des mécènes, comme sur le site du Centre Français des Fonds et Fondations.

Demander des aides pour un projet est parfois un parcours du combattant, mais si votre projet est bien pensé et rédigé, vous aurez déjà une longueur d’avance ! Et si jamais votre demande de subvention n’est pas retenue, n’hésitez pas à prendre rendez-vous, ou demander par mail pourquoi, pour représenter un projet l’année d’après. Parfois refusé une année, un projet monté légèrement différement sera soutenu celle d’après !

Des ressources utiles 

Plusieurs institutions rédigent des fiches pratiques destinées aux porteureuses de projet. Vous pouvez y trouver plein d’informations utiles sur le droit, les rémunérations, les questions d’organisation, les différentes lois, etc., le tout trié par thématique, pour vous aider à monter votre projet. N’hésitez pas à fouiller les bases de données !

J’en ai sélectionné quelques-unes pour vous :

Sur l’espace Ressources d’ARTCENA, Centre national des arts du cirque, de la rue et du théâtre :

Les fiches pratiques du Centre National du Théâtre (désormais fusionné à ARTCENA) :

Les fiches pratique du Centre National de la Danse :

Sur l’espace Ressources de la NACRE :

Sur l’espace Ressources du Centre National du Livre :

Sur l’espace Ressources du Centre National du Cinéma :

Vous pouvez aussi retrouver des modèles de contrats, et d’autres informations juridiques pour le spectacle vivant sur le site internet de Scène Juridique. Sachez aussi que le CND et ARTCENA ont des services juridiques que vous pouvez contacter ou auprès de qui vous pouvez prendre directement rendez-vous (sur place ou par téléphone) avec un·e juriste qui répondra à vos questions.

Pour les arts plastiques, vous pouvez retrouver des informations juridiques sur les statuts des œuvres et des artistes sur le site de l’AGESSA, du Centre National des Arts Plastiques.

En tant que porteureuse de projet, vous pouvez aussi répondre à des appels à projets qui permettront de trouver des financements, des lieux pour travailler en amont (résidences par exemple), etc.

Quelques exemples de sites internet où vous pouvez retrouver des appels à projets : Culturables pour les Hauts-de-France, la NACRE pour Auvergne-Rhône-Alpes, le CND qui édite la lettre des appels à projets tous les mois pour la danse, les appels à projets du Ministère de la Culture, sur les sites des Conseil Régionaux ou Départementaux, celui de l’Institut Français, de l’ADMICAL, etc.