
On poursuit cette série contraception en attaquant les versions sans hormones par le DIU, pour dispositif intra-utérin, le bien mal nommé « stérilet ». Ce nom, purement francophone (je n’ai pas croisé d’autres langues où il porte autre chose que son nom descriptif) n’a rien d’anodin, puisqu’il laisse flotter l’idée que cette petite chose pourrait rendre stérile… ce qui n’est absolument pas le cas !
Il s’agit d’un dispositif en plastique souple, le plus souvent en forme de T, de 3 à 4 cm, recouvert d’un fil de cuivre, qui se dispose dans l’utérus. Le cuivre est spermicide, c’est-à-dire qu’il inhibe l’action des spermatozoïdes. Ils doivent, pour permettre une fécondation, remonter les long des trompes pour aller rencontrer l’éventuel ovocyte. Les ions du cuivre perturbent le mouvement, les amenant à rester dans la cavité utérine.
Photo de différents DIU au cuivre à côté d’une pièce de 1 €.
L’efficacité du DIU est directement lié à la quantité de cuivre. Les modèles actuellement disponible contiennent 375 à 380 mm² de cuivre, pour une efficacité de 99,5 %. Le DIU le plus posé en France pendant longtemps contenait 200 mm² de cuivre, et son efficacité tournait plutôt autour des 90 %, d’où une partie de la mauvaise réputation du DIU en France puisque les utilisateurices concerné·es ont le souvenir d’avoir observé beaucoup de grossesses à l’époque. Avec la quantité de cuivre actuelle, les DIU sont efficaces 5 ans, un modèle est même validé pour une efficacité de 10 ans. Ce n’est donc jamais une urgence à quelques mois près pour le changer au-delà des 5 ans prévus.
Puisque dénué d’hormones, le DIU ne présente pas d’effets secondaires généraux. Localement, il peut en revanche augmenter le volume et la durée des règles (de l’ordre de 1 à 2 jours de plus que d’habitude) pour environ la moitié des utilisateurices. Dans 2 % des cas, c’est suffisamment abondant pour amener à un retrait. L’utérus peut également réagir par de fortes contractions, entraînant un déplacement du DIU : dans 2 % des cas, il y a expulsion, et beaucoup plus rarement, dans 1 cas sur 1 000, il y aura une perforation de l’utérus : le DIU se retrouve alors dans la cavité abdominale, et une chirurgie est nécessaire pour aller le récupérer.
Il n’y a pas d’autres effets secondaires du DIU, en théorie. Mais si vous passez au DIU après avoir été sous contraception hormonale plus ou moins longtemps, vous allez retrouver votre cycle naturel, avec les effets parfois désagréables que cela peut impliquer : retour des douleurs de règles, acné, variations d’humeur, par exemple. Il n’est pas rare non plus d’avoir l’impression d’avoir beaucoup plus de pertes vaginales qu’avant, au point parfois de se demander s’il ne s’agit pas d’une infection, alors que c’est tout simplement que la sécheresse vaginale est fréquente sous contraception hormonale, et pas toujours identifiée comme telle.
L’idéal est de se donner 3 à 6 mois d’essai, le temps de s’habituer aux nouveautés du cycle naturel, sans compter que l’augmentation de volume des règles a aussi tendance à se calmer avec le temps. Naturellement, vous êtes tout à fait en droit de retirer le DIU plus tôt si vous ne vous sentez pas bien avec.
Les contre-indications au DIU au cuivre sont peu nombreuses : une malformation ou déformation de l’utérus, une infection utérine en cours (il faut alors attendre 3 mois pour le poser), un cancer utérin en cours, une allergie au cuivre (rarissime et spectaculaire : si vous l’êtes, vous le savez déjà).
Le DIU au cuivre est remboursé à 65 %, 10 € restent à votre charge si vous n’avez pas de mutuelle ou de CMU. Il peut être prescrit et posé par un·e sage-femme, un·e généraliste ou un·e gynécologue. Classiquement, il est posé pendant les règles, ce qui serait supposé faciliter le passage du col, mais les études récentes ne montrent pas de différence selon le moment du cycle. Du coup, attendre les règles peut être intéressant si vous n’avez pas de contraception avant de le mettre, sauf si vous êtes sûr·e à 100 % de ne pas être enceint·e. En revanche, si vous êtes déjà sous contraceptif, le relais peut se faire n’importe quand, et il est inutilement dangereux d’arrêter la contraception précédente pour « provoquer » les règles comme parfois préconisé par certain·es praticien·nes : c’est un coup à tomber enceint·e dans l’intervalle ! Il peut également être posé 4 semaines après un accouchement, et 15 jours après une IVG (voire pendant une IVG chirurgicale). Et dans le cadre d’une contraception d’urgence, s’il est posé dans les 5 jours après le rapport à risque, il est efficace à 99,9 %.
Photo d’un DIU au cuivre dans son tube d’insertion à côté d’une pièce de 1 €.
Le DIU se présente dans un tube d’insertion en plastique souple, assez long puisqu’il s’agit de le manipuler depuis l’entrée du vagin. La boîte est donc très grande, c’est tout à fait normal. La pose se passe en cabinet (pas besoin de bloc ou d’autre lieu spécial), sous spéculum, pour accéder au col. Le col est d’abord désinfecté, et les branches du DIU sont rétractées dans le tube d’insertion. À partir de là, 2 possibilités :
Ensuite, on coupe les fils, en général autour de 3 cm, qui vont dépasser du col dans le fond du vagin. La longueur laissée dépend beaucoup des habitudes de chaque praticien·ne. À titre personnel, je trouve que des fils plus longs se replient mieux autour du col, donc entraînent moins de gêne, sans compter qu’il est toujours possible de les recouper plus courts si nécessaire, alors que des fils trop courts peuvent vite se retrouver à l’intérieur du col si le DIU bouge un peu, entraînant un retrait plus désagréable.
Photos montrant l’insertion d’un DIU au cuivre à l’intérieur d’un simulacre d’utérus.
La pose peut aller de parfaitement indolore à franchement pénible. Le contact avec læ praticien·ne et le fait de connaître le processus jouent beaucoup. À ce jour, aucun médicament n’a prouvé une efficacité statistique sur la douleur de pose, mais rien ne vous empêche de prendre un anti-douleur avant, de préférence un anti-inflammatoire plutôt que du paracétamol (c’est plus efficace sur les douleurs utérines) pour anticiper les éventuelles douleurs juste après la pose. L’anesthésie locale n’est pas proposée car contre-productive : l’injection d’anesthésique est plus douloureuse que le geste lui-même.
La pose du spéculum peut être désagréable, mais ne doit pas être douloureuse. Un spéculum ne doit jamais être posé sans votre consentement, sans douceur, ni sans lubrifiant. En cas de douleur, il est possible de changer la taille du spéculum utilisé, de changer de position, d’ajouter plus de lubrifiant, de reporter à une prochaine consultation (le col peut être plus ou moins facile d’accès selon le moment du cycle), voire de changer de soignant·e si votre douleur n’est pas prise en compte !
La désinfection du col et le passage du tube inserteur sont parfois désagréables, sans aller jusqu’à la douleur. Le fait de toucher le col directement peut être très étrange, vu que c’est un contact inhabituel. Il en est de même pour le moment où l’hystéromètre et le DIU touchent le fond utérin : ça surprend.
L’utilisation de la pince de Pozzi est souvent douloureuse, d’où l’intérêt d’un·e praticien·ne qui ne l’utilise que si nécessaire (malheureusement parfois ça ne passe pas sans).
Le moment où les branches du DIU s’ouvrent dans l’utérus provoque parfois une forte contraction pendant une minute ou deux, qui se relâche rapidement.
Enfin, le fait de toucher au col, même s’il n’y a pas eu de douleur ressentie, peut parfois provoquer un malaise vagal, toujours désagréable. Il passe en quelques minutes en restant allongé·e. Si toutefois vous y êtes souvent sujet·te, il peut être plus confortable de venir accompagné·e, ou de prévoir un temps de pause dans la salle d’attente après la consultation.
Juste après la pose, vous pouvez ressentir comme des douleurs de règles pendant 24 à 48 h, rarement plus, qui doivent être soulagées par les anti-douleur.
En revanche, si dans les 3 premières semaines après la pose vous ressentez des douleurs fortes mal soulagées par les antalgiques, de la fièvre, des pertes vaginales malodorantes ou des saignements en dehors des règles, n’hésitez pas à consulter. Du fait qu’on passe du vagin, qui contient toujours quelques germes, vers l’utérus qui n’est pas supposé en contenir, il y a un léger risque d’infection lors des 21 jours suivant la pose. Passé ces 21 jours, il n’y a ni plus ni moins d’infections utérines que si vous n’aviez pas de DIU. En cas d’infection, des antibiotiques sont prescrits, et si l’infection persiste malgré le traitement, il est alors nécessaire de retirer le DIU.
À cause de ce risque infectieux, si le jour prévu pour la pose vous présentez des douleurs ou des pertes suspectes, on traitera l’infection locale avant de poser le DIU. Si vous n’avez pas de symptômes, un prélèvement vaginal n’est pas nécessaire. En revanche, la recherche du chlamydia peut être intéressante. Il s’agit d’une bactérie sexuellement transmissible, qui peut être présente dans le vagin sans signe particulier, mais donne des infections de l’utérus et des trompes qui peuvent être sévères, et laisser des séquelles sur la fertilité. Si vous n’avez pas été récemment dépisté·e, votre praticien·ne peut vous prescrire cet examen en même temps que le DIU, histoire de ne pas prendre de risque.
Les toutes premières règles après la pose sont généralement nettement plus abondantes et douloureuses que d’habitude. Ce ne sera pas comme ça à chaque fois, c’est juste que le DIU bouge souvent légèrement avec les contractions des règles pour prendre sa place définitive. N’hésitez pas à prendre des anti-douleurs ! Si vous le souhaitez, vous pouvez consulter après ces premières règles pour un contrôle de la position du DIU : læ praticien·ne vous examine sous spéculum pour vérifier que les fils sont restés à leur place. Cet examen n’a bien sûr rien d’obligatoire. Une échographie (par voie vaginale) de contrôle est parfois prescrite ; si les fils sont visibles et que vous ne ressentez pas de douleur en dehors des règles, elle est inutile. En effet, une règle totalement arbitraire (absolument pas validée par des études) définit une distance maximale entre le DIU et le fond de l’utérus. Si l’échographiste suit cette règle (et ils le font souvent), iel va vous faire flipper sur l’efficacité de votre DIU… pour rien. À l’heure actuelle, aucune donnée ne témoigne d’une différence d’efficacité selon la position du DIU (cuivre ou hormonal) dans l’utérus. Tant qu’il est dedans, c’est bon !
Les fils sont parfois perçus au moment des rapports les premières semaines, mais en général assez rapidement, ils se ramollissent au contact des sécrétions vaginales et viennent se plaquer au fond autour du col. Si la gêne persiste, il est possible de recouper les fils plus courts, voire de les couper au ras du col (mais dans ce cas le retrait sera un peu plus délicat). Si vous avez besoin que votre contraception reste secrète, notamment dans le cadre de violences conjugales, vous pouvez demander dès le départ à ce que le fil soit coupé au ras du col. Votre DIU ne sera alors visible que sur une radio ou une échographie. La plupart des notices recommandent de contrôler vous-même la présence des fils de temps en temps du bout des doigts. C’est une recommandation à prendre avec du recul, car au fil du temps les fils deviennent vraiment très mous, donc parfois difficiles à percevoir. Si ça vous rassure, vous pouvez le faire, mais le jour où vous ne les sentez plus, allez consulter sans paniquer tout de suite !
Comme pour la pose, lors d’une consultation en cabinet, sous spéculum. Si les fils sont visibles, læ praticien·ne les attrape avec une pince et tire : c’est peu ou pas douloureux, et rapide. Si les fils ne sont pas visibles, il faut d’abord s’assurer via une échographie que le DIU est bien dans l’utérus. Dans un premier temps, on passe dans le col une pince très fine pour venir essayer d’attraper le fil : c’est assez désagréable. Et si læ praticien·ne échoue, il vous faudra alors passer par une hystéroscopie : un tube optique est passé dans le col, sous spéculum, pour venir retirer le DIU sous contrôle visuel. C’est assez désagréable aussi, mais une anesthésie locale est généralement pratiquée.
Un certain nombre d’idées reçues circulent à propos du DIU, pour une bonne partie entérinées malheureusement par les soignant·es elleux-même. Un grand nombre de ces légendes sont spécifiques à la France, par un mystère mal éclairé.
« On ne peut pas poser de DIU si on n’a pas déjà accouché… »Non, il n’y a aucune restriction particulière dans ce cas. En France, des DIU sont spécifiquement destinés aux nullipares, les versions « short », qui mesurent 4 à 5 mm de moins que les modèles standards. Dans d’autres pays, seules les versions standards sont utilisées pour tou·tes, sans soucis particuliers. Cette distinction permet de rassurer soignant·es et patient·es, mais si on vous a posé un standard alors que vous être nullipare ou vice versa, ça n’a aucun importance. Il y a plus de variations inter-individuelles sur la taille de l’utérus qu’entre nullipares et multipares.
« On ne peut pas utiliser de coupe menstruelle avec un DIU… »Non, aucun lien n’est établi à ce jour entre les deux. L’effet de ventouse de la coupe, même si elle est retirée sans faire le vide auparavant, ne peut pas faire d’appel d’air de l’utérus vers le vagin, puisqu’il n’y a pas d’air dans l’utérus : les illustrations habituelles de l’utérus induisent en erreur, il s’agit d’une cavité virtuelle, c’est à dire que ses parois sont plaquées l’une contre l’autre. Quand on y pose un DIU, il se cale entre les parois, tout simplement, mais il n’y a aucun espace autour. Les expulsions se font le plus souvent pendant les règles, et c’est pendant les règles qu’on utilise une coupe, d’où le DIU retrouvé parfois dans la coupe, mais il n’y a pas de lien de causalité entre les deux.
« Les anti-inflammatoires diminuent l’efficacité du DIU… »Non, il n’y a qu’en France que persiste l’idée que l’efficacité du DIU serait dû à une réaction inflammatoire stérile empêchant l’implantation d’une grossesse, d’où restriction sur les anti-inflammatoires. C’est bien l’effet spermicide du cuivre qui est mis en œuvre, et les anti-inflammatoires sont au contraire les anti-douleurs recommandés dans ce cas précis par plusieurs études.
« Le DIU est abortif (c’est-à-dire provoque un avortement)… »Non, une fois encore, c’est bien l’effet spermicide qui fonctionne. Martin Winckler a écrit un article très clair sur le sujet.
« Le DIU est contre-indiqué si on a déjà eu une grossesse extra-utérine… »Non. Il est vrai que parmi les grossesses sous DIU, une proportion plus importante des grossesses sont extra-utérines. Mais comme il y a beaucoup moins de grossesses sous DIU que sous pilule ou préservatifs, le risque absolu de développer une grossesse extra-utérine sous DIU est plus faible que sous une autre contraception, à l’exception du DIU hormonal et de l’implant.
« Une grossesse sous DIU est dangereuse… »Non, mais il est vrai que le risque de grossesse extra-utérine et de fausse-couche est augmenté. En cas de retard de règles ou de symptômes de grossesse, il est donc recommandé de faire rapidement un test de grossesse et une échographie. Si la grossesse est confirmée et que les fils sont visibles, il est recommandé de retirer le DIU, quel que soit votre décision concernant la grossesse. S’il n’a pas pu être retiré, il n’empêche ni l’IVG, ni le développement de l’embryon.
« Le DIU est contre-indiqué si on a déjà été enceint·e sous DIU… »Non, vous n’avez simplement pas eu de chance, mais votre risque de grossesse sous DIU reste le même. Si vous le souhaitez, vous pouvez l’utiliser à nouveau.
Nous espérons que cette série d’articles vous a permis d’y voir plus clair et de vous aider à choisir votre contraception.