
Quoi de plus normal, à l’approche d’Halloween, que de vous faire (re)découvrir Coffin Rock, une sorcière créative, fan d’épouvante, d’écologie, de sang et de douceur qui fabrique depuis 2009 des objets utiles pour transformer sa maison en véritable manoir hanté ?
Je cherchais un nom qui rassemblait à la fois mon côté sombre – je suis quand même relativement goth –, mon côté rock’n’roll et qui me reliait au cinéma d’horreur. Coffin Rock est un lieu dans Le Projet Blair Witch, Coffin veut dire cercueil en anglais et Rock… pas besoin de détails… C’était donc le combo parfait pour un nom. Étonnamment, j’ai beaucoup de gens qui m’appellent Coffin et comme j’ai un prénom particulier et unique que j’aime à garder pour moi, mes ami·es proches et ma famille ça me va bien ! J’ai tenté à plusieurs reprises de trouver un nom francophone mais tout était trop long. Coffin Rock c’est court, ça claque et ça reste assez bien dans la mémoire des gens et moi… Ben… j’adore sa sonorité !
Ça dépend des moments. Je navigue d’une création à une autre, parfois je ne fais que broder, parfois que coudre, de temps à autres je bosse sur des films ou clips et je répands du sang partout… Les savons c’est vraiment mon côté sorcière qui ressort comme lorsque je suis dans mon petit bout de jardin et que je cueille les plantes qui serviront à faire des smoke cleansing (fumigations), des tisanes ou encore des sels de bain… J’aime et j’adore toutes les parties de mes choix créatifs ! Bien entendu, j’ai envie de travailler d’autres matières, le bois, le carton, faire de la papeterie, dernièrement j’ai commandé de la cire végétale et j’ai commencé à fabriquer des bougies… Bref, il y a tant de matières à transformer !
Je dirais de manière fourre-tout, le cinéma, les arts et la musique. Mais c’est pas vraiment très précis. Bon je scrolle pas mal sur Internet… Mes influences culturelles vont des graveureuses fantastiques du siècle dernier aux botanistes de l’histoire, j’aime m’imprégner des sorcières, des films en noir et blanc, de l’occulte, des rituels magiques du monde entier, des croyances religieuses et ancestrales, de ce qui est caché et fait peur aux gens…
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Ahhhh LA question qu’on me pose beaucoup ! J’ai évidemment mes petits secrets, mais je peux en révéler un… J’en fais imprimer certains ! J’avais en tête des idées d’affiches de films anciens sur mes pochettes et coussins. On oublie que les films en noir et blanc avaient des affiches ultra colorées et lorsque j’ai découvert ça, j’étais obligée d’en proposer ! J’ai donc cherché sans trop trouver et finalement j’ai opté pour la solution de les faire imprimer moi-même. Ça coûte un peu plus cher au mètre mais ça permet surtout de pouvoir personnaliser ce que l’on fabrique. Je n’ai pas encore « designé » un motif vraiment personnel, mais j’ai fait imprimer des photos de mes vacances d’hiver dans les Pyrénées, des paysages, des détails de la nature, des pentacles de plantes… D’autres arrivent bientôt et si je trouve le temps un jour – ou peut-être une nuit – j’aimerais créer des motifs de tissus… À voir donc !
Bonus tips : Les États-Unis ont beaucoup de designeureuses de tissus avec lesquel⋅les je travaille ; iels ont des imprimés superbes et surtout la qualité est vraiment bonne !
J’ai grandi en Suisse et à l’école primaire on apprend à faire de la couture et des travaux manuels ; du coup, j’ai eu des bases enfant, mes parents fabriquaient de beaux jouets en bois qu’ils vendaient sur les marchés, j’ai donc aussi bricolé avec eux et vu toute mon enfance cet univers et sa concrétisation. Par la suite, oui, je me suis formée en autodidacte, les livres, les tutos sur les blogs, sites, chaînes vidéos… je suis tout le temps en train d’apprendre (surtout en broderie où il y a mille possibilités même avec une machine à broder) et j’améliore ma couture encore et encore !
L’avantage de l’artisanat (mot que je n’ai légalement pas le droit d’employer, mais que j’aime utiliser quand même) c’est que le travail fait main est variable, il y a toujours de nouvelles techniques à apprendre, de nouveaux matériaux à travailler, des détails à changer pour améliorer son travail, sa rapidité, ses finitions, son « marketing »… Bref, c’est un monde qui n’est pas constant mais très évolutif. Je trouve cela intéressant et motivant.
Utilisation du mot « artisanat » : pour pouvoir se dire artisan·e et s’installer en tant que tel·le, il faut obtenir un diplôme de l’artisanat. Quels métiers sont reconnus comme faisant partie de l’artisanat ? En France, il y a la NAFA où l’on trouve toutes les activités appartenant au domaine de l’artisanat. Voici le décret qui les énonce.
C’est une question qu’on pose TOUT LE TEMPS aux artistes, créateurices et artisan·es qui est assez agaçante en fait. [NDLR : Oops] Je pense que « se faire un nom » relève d’un défi quotidien, les réseaux sociaux que j’utilise beaucoup (surtout Facebook et Instagram que j’adore) permettent d’être en contact avec les gens, de leur montrer les avancées de mon travail, de communiquer ensemble. Je pense que les réseaux sociaux aident vraiment au développement des toutes petites entreprises comme la mienne et permettent de montrer au jour le jour le travail que ça demande de faire tel ou tel objet.
Avec Instagram je fais beaucoup de photos, du travail en cours dans mon atelier, des créations mises en situation – et bien sûr, des photos de mes chattes, de ce que je mange, des endroits où je me balade, j’allie donc lifestyle et créations et, d’une certaine manière aussi, de l’empowerment. J’aime montrer aux gens que c’est possible, qu’on peut tou·tes faire des choix, des activités qui peuvent transformer le monde dans lequel on vit, pour ça Facebook par exemple permet de partager beaucoup d’articles, de points de vue et surtout d’avoir les commentaires pour échanger ! Les sujets comme l’acceptation de nos corps, de nos sexualités, du rapport que l’on a avec les animaux, avec la nature, sont souvent des sujets que je mets en avant dans le but d’améliorer notre perception de nous-même et du monde qui nous entoure. C’est un mélange qui rappelle à la fois qu’une marque c’est aussi « quelqu’un·e » de réel·le derrière et à l’heure où on a l’impression en commandant sur Internet que tout est fait par des machines, ça permet de montrer que la trousse que je vais envoyer a demandé un travail de fabrication, qu’elle s’inscrit aussi dans un univers global, c’est-à-dire que l’ambiance, le tissu choisi, sa forme s’inscrivent dans une recherche artistique, ce n’est jamais juste un objet.
Je vends ce que je fabrique et je fabrique ce que je suis. Mon univers personnel est semblable à mon univers créatif. Je crois que ça, c’est la clef principale de l’intérêt des autres pour ce que je fabrique !
Le mot de la rédaction :
Les prix des petit·es créateurices sont différents de ceux des grandes marques pour plein de raisons :
Crédits photo : Lights From Attic.
Je pense, et ceci n’engage que moi, que le fait de choisir son activité qui est aussi une passion ça fait peur. Pourquoi ? On vit dans un monde régi par le travail. Travailler c’est bien, avoir un rythme, un·e patron·ne, des horaires, un salaire fixe. L’artiste, l’artisan·e, læcréateurice sont (un peu) en dehors de ce système habituel. Iels ont toujours été montré·es comme des personnes en dehors de la rigidité de la société.
Ce sont des esprits libres, qui brisent les codes établis. Cette liberté fait peur et surtout n’est que rarement mise en avant. Du coup, de mon expérience, les gens qui m’ont posé cette question étaient surtout interloqué·es à l’idée que l’on puisse être en dehors de ce rythme qu’iels ont adopté et qui leur semble être la seule voie possible pour vivre une vie harmonieuse et surtout « pas trop différente des autres », puisqu’être différent·e fait encore très très peur !
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Donc j’entends la question un peu comme une critique et comme une peur. Du genre « oh mais comment as-tu osé suivre ton propre chemin alors que moi je n’en ai pas eu le courage puisqu’on m’a toujours dit que c’était pas du tout la voie à suivre ! Et puisque tu le fais, est-ce que ça marche ? Parce que si oui, ça remet en question mon ordre établi et surtout ça me permet de me dire que je suis peut-être plus libre que je ne l’avais pensé dans ma vie. »
Mais encore une fois, c’est vraiment une sur-interprétation de ma part et c’est comme ça que je le sens. Et puis bon, il y a aussi les gens qui posent cette question parce qu’iels sont mal à l’aise d’être en face d’un stand, de savoir qu’iels ne vont rien acheter et posent la première question qui leur vient à l’esprit.
Parmi les créateurices il y a beaucoup de femmes, mais dans des sous-genres où j’aime à travailler, il y a aussi pas mal d’hommes. En général, c’est vrai que c’est assez genré, les filles de mon entourage sont plutôt papeterie, bijoux, couture et les garçons bois, métal et cuir ; en illustration également il y a une partie masculine présente. Mais ça se mélange parfois aussi. J’essaie d’équilibrer un peu, pour que la création sorte du cliché que « c’est fait par des filles pour des filles »… Le monde de l’art est vaste, il faut réussir à réunir un peu tout le monde !
Avec les marchés que j’organise à Bordeaux – le Marché des sorcières en avril et celui de la Dernière chance le dimanche avant Noël – j’essaie de proposer une diversité dans les créations et les créateurices… Et je dirais que j’ai environ un tiers de messieurs pour deux tiers de mesdames. Et pour l’instant je n’ai aucune personne trans dans mes contacts qui fait des créations…
Une seule chose ? Peut-être faire des machines silencieuses… Quand mon motif de broderie contient beaucoup de points et que la machine tourne durant 3, 4, 5 heures non stop, j’ai un peu la tête en vrac…
Ou alors un truc qui change automatiquement les bobines de fil de couleur, ou alors qu’une fois tracé la forme sur mon tissu il se coupe tout seul… Ou bien… Hahahaha, non ce n’est pas une question à une seule réponse !