26 mai 2017

Expliquez-moi le Ramadan

Expliquez-moi le Ramadan

On y est, le Ramadan 2019 (ou 1440 dans le calendrier musulman) commencera dans quelques jours ! C’est une période importante pour les musulman·es, un mois saint de jeûne et de prières très attendu dans le monde musulman.

Article mis à jour le 06 mai 2019.

À quoi correspond le Ramadan ?

C’est le 9e mois du calendrier musulman, qui est un calendrier lunaire. On détermine donc les dates de début et de fin du mois de Ramadan par l’observation du hilal (premier croissant de lune qui apparaît en début de soirée) lors de ce qui est appelé la Nuit du doute : le 29e jour du mois précédant Ramadan, les musulman·es observent le ciel à la recherche du hilal. Dans le cas où il apparaît, le mois de Ramadan débute le lendemain. Dans le cas contraire, les musulman·es ne débutent pas la période de jeûne le lendemain mais le surlendemain. C’est une tradition de la Sunna (habitude suivie par le prophète), suivie dans de nombreux pays. Mais dans d’autres pays comme la Turquie, c’est par des calculs astronomiques qu’est déterminée cette date.

Le croissant de lune observé pour déterminer la date du début du Ramadan.

L’apparition du premier croissant de lune peut différer d’une région à une autre. Cela a été le cas en 2016 pour les Comores, Mayotte et la Réunion, où le mois du Ramadan avait débuté le 7 juin alors qu’en France métropolitaine il avait débuté le 6 juin.

Pourquoi le mois de Ramadan est-il important ?

Dans la tradition musulmane, c’est durant ce mois que le Coran, livre saint des musulman·es, a été révélé au prophète Muhammad (Mahomet) par l’archange Djibril (Gabriel). De plus, le jeûne durant le mois de Ramadan est un des cinq piliers de l’islam.

Le Ramadan est le mois de la charité et de la solidarité. Que ressentent les gens souffrant de famine ? Quand nous avons les moyens, nous ne nous posons pas la question. Cependant beaucoup de gens le vivent sans avoir le choix. Se mettre à la place de l’autre nous aide à mieux comprendre et donc à nous inciter à aider et être solidaire. C’est pour cela qu’à la fin du Ramadan, un autre pilier de l’islam prend place, la zakat. C’est une somme que tout·e musulman·e ayant les moyens doit donner aux personnes dans le besoin, ou à une organisation qui s’occupe de distribuer l’argent.

En quoi consiste le jeûne ?

On sait que les principes du jeûne les plus évidents sont de ne pas boire et de ne pas manger. Les musulman·es qui jeûnent ont également l’interdiction de fumer, d’avoir des relations sexuelles et d’insulter ou d’avoir des paroles blessantes. Iels sont également invité·es durant cette période à multiplier les bonnes actions et les prières ainsi qu’à lire le Coran.

Chaque musulman·e sain·e d’esprit et ayant atteint la puberté est dans l’obligation de jeûner en ce mois saint. Les personnes malades chroniques ou âgées craignant pour leur santé en sont dispensées, iels doivent alors compenser en donnant de la nourriture tous les jours du Ramadan à une personne en nécessité. Les voyageureuses, les personnes malades temporairement et les personnes enceintes qui ne s’en sentent pas capables peuvent être dispensé·es de jeûner durant leur voyage, le temps de guérir ou le temps de la grossesse. Dans ce cas, après le Ramadan, iels doivent rattraper les jours manqués. Les enfants ne sont pas concerné·es par l’obligation de jeûner. Toutefois iels sont encouragé·es à jeûner quelques fois pour s’habituer.

On dit souvent que le jeûne dure du lever du soleil à son coucher. Mais c’est faux : il dure de l’aube jusqu’au crépuscule. Pour cette année en France, la période de jeûne sera d’un peu plus de 18 heures. Elle est très variable selon où l’on se place sur le globe : en Syrie par exemple, elle sera de 15 heures environ et aux Comores de 13 heures. Dans des cas particuliers où la journée ou la nuit sont très courtes comme en Suède, les musulman·es suivent la durée du pays le plus proche ou de l’Arabie saoudite.

Ramadan à Mayotte

Elawan :

« C’est une période tellement attendue que juste après la prière du crépuscule, on se précipite sur le balcon pour rechercher le hilal. On appelle même sa grand-mère pour vérifier qu’on ne s’est pas trompé·e. Et on attend la confirmation à la radio du Grand Cadi (chef religieux) de Mayotte. Dès lors, on sait que dès le lendemain à l’aube on devra jeûner.

Certaines personnes s’inquiètent beaucoup de ne pas me voir manger la journée et pensent (à tort) que je peux faire une crise d’hypoglycémie à tout moment. Rassurez-vous, ce n’est pas parce que je ne mange pas la journée que je vais mourir de faim ! En fait, on s’organise autrement : on mange un peu avant de démarrer le jeûne, après la rupture du jeûne et dans la soirée. Hop ! On a nos trois repas par jour !

Il faut rompre le jeûne le plus rapidement possible dès qu’on entend l’appel à la prière du crépuscule, avec un peu d’eau ou de jus de fruits de saison. Le foutari (ou ftour, « repas de rupture du jeûne ») un peu plus tard est composé de plats traditionnels comoriens, comme les bananes et le manioc frit·es, les mkatra foutra ou les mardoufs (deux sortes de galettes) avec de la viande ou du poisson en sauce.

Vue du minaret de la mosquée d’un village mahorais.

Après la rupture du jeûne, les hommes et les garçons de la famille se rendent à la mosquée pour la prière du Tarawih, qui est une prière particulière mais qui n’est pas obligatoire. Les femmes peuvent également s’y rendre, mais dans des mosquées réservées aux femmes ou dans un espace non mixte dans la mosquée du quartier ou du village. Celleux qui ne se déplacent pas en profitent pour écouter à la radio les rappels sur la religion et sur la foi. Il nous arrive aussi de voir ou de revoir à la télé les chants religieux traditionnels mahorais comme le deba ou le dahira. »

Ramadan en Syrie

Azadi :

« Le Ramadan c’est le mois de la famille et des voisin·es, cette période est basée sur le partage et la convivialité. Chaque voisin·e peut apporter une assiette à un·e autre, et à d’autre moment iel peut inviter les autres voisin·es à sa table pour manger. Dans ma ville et mon bâtiment, cette alternance est une tradition. De même quand on est invité·e, on apporte un petit plat avec nous pour participer au repas.

Les repas sont un peu différents de d’habitude puisque l’on essaye de boire le plus d’eau possible, ce qui explique la forte quantité de soupes et de jus. La plupart du temps on commence le repas par boire de l’eau, manger quelques dattes, ensuite la soupe et puis le plat.

Il existe même des spécialités culinaires du Ramadan ; mes préférées sont le kibbeh de lentille et le Na’émme (une spécialité damasienne sucrée, c’est un type de pain fin couvert de sirop de datte).

Après le repas, certain·es se rendent à la mosquée pour la prière du Tarawih, et d’autres la font chez elleux tou·tes ensemble, c’est toujours mieux de le faire à plusieurs. D’autres ne font pas cette prière.

Dans les rues, les balcons ou les fenêtres sont décoré·es, la décoration ressemble un peu à celle de Noël en France, mais avec le croissant et une inscription en arabe disant « Ramadan Kareem » à la place du sapin.

Décorations de rues à l’occasion du Ramadan à la porte de Damas, dans la vieille ville de Jérusalem (photo par Jennifer Lisa).

Les restaurants profitent de l’occasion pour proposer des repas de Ramadan. Un pour le fatour (le repas de la rupture du jeûne) et un autre pour le sahour (le repas avant le jeûne) à 3 h du matin.

Les boutiques s’organisent différemment aussi, elles restent ouvertes jusqu’à 2 h du matin, et donc toutes les sorties sont faites après la rupture du jeûne.

En gros la vie est organisée de façon différente. »

Ciel étoilé dessiné avec une inscription « Ramadan Kareem », « Joyeux Ramadan » en arabe. source.

Fin du Ramadan

Il y a une nouvelle Nuit du doute pour déterminer la date de l’Aïd el Fitr, donc de la fin du Ramadan. Le 29e jour du Ramadan, on recherche le hilal comme pour le début. S‘il est aperçu, l’Aïd sera donc le lendemain, sinon ce sera le surlendemain.

L’Aïd el Fitr (littéralement « fête de la rupture ») est un grand jour de fête (avec l’interdiction stricte de jeûner !) : après la prière pour cette occasion, les fidèles doivent verser la Zakat el Fitr (l’aumône de fin de Ramadan) aux plus démuni·es. Ce jour-là, on se pare de nos plus beaux vêtements pour rendre visite aux proches, aux voisin·es et leur « donner la main de l’Aïd » (traduction littérale d’une expression mahoraise qui signifie « saluer et souhaiter une bonne fête »). Les enfants qui ont pu jeûner quelques jours ou les trente jours reçoivent des cadeaux, comme pour le Noël des chrétien·nes.

Pour l’occasion, du thé au lait ou au gingembre et des gâteaux (les fameux gâteaux que certaines personnes chérissent tant !) sont préparés pour le ballet des invité·es qui passeront à la maison.

Même si c’est un jour de fête, les musulman·es ressentent une légère tristesse : le Ramadan est terminé. Mais iels n’ont qu’une seule hâte : qu’il revienne vite l’année prochaine !