26 juin 2017

Gouinement lundi, l’émission 100 % lesbienne et bie : entretien avec l’équipe

Gouinement lundi, l’émission 100 % lesbienne et bie : entretien avec l’équipe

En ce mois des Marches des Fiertés en France, on vous propose de découvrir Gouinement lundi, une émission de radio dédiée aux thématiques LBT, diffusée sur Fréquence Paris Plurielle (dont on a parlé dans Du docu dans vos oreilles #3). On a posé quelques questions à Lila qui a rejoint l’équipe de Gouinement lundi depuis octobre 2016 et a co-animé la plupart des émissions de cette année !

Racontez nous Gouinement lundi ! Quand l’émission a-t-elle été créée ? Dans quel(s) but(s) et contexte(s) ?

Tout a commencé fin 2015 : Brahim Naït-Balk, l’animateur d’HomoMicro (émission de radio consacrée à l’actualité LGBT et diffusée sur Fréquence Paris Plurielles) a fait une émission spéciale avec uniquement des lesbiennes en invitées. Suite à cette émission, HomoMicro a proposé de passer un créneau de 1h30, le 4e lundi de chaque mois, pour parler spécifiquement des problématiques lesbiennes et bies : Gouinement lundi était né ! Il faut savoir qu’HomoMicro est très centrée sur les thématiques gays. Dans le paysage radiophonique, il n’y avait aucune émission dédiée aux thématiques LBT. Gouinement lundi a été un peu créée par hasard dans le sens où il n’y a pas eu de vrai projet de lancer une émission de radio LBT, mais on a su saisir l’opportunité et au final, on a comblé un manque, c’est ça qui est le plus important.

Au début, trois associations géraient l’émission : FièrEs, SOS homophobie et l'Inter-lgbt. Brahim Naït-Balk présentait l’émission, ce qui a vite posé problème ; il a été remplacé par deux animatrices (une de FièrEs et une de SOS homophobie). Le « format trois associations qui gèrent » a changé : les associations étaient très différentes et n’avaient pas les mêmes opinions sur certains points. Aujourd’hui, Gouinement lundi a réussi à s’émanciper de ces trois associations et est autonome. Le partenariat n’existe plus vraiment, les associations ne vérifient pas les contenus qui seront diffusés… Par contre, l’équipe est toujours composée de bénévoles de ces associations, mais nous parlons en notre nom, nous ne les représentons pas.

Comment avez-vous choisi le nom « Gouinement lundi » ? Le sous-titre de l’émission est « 100% lesbienne et bie » : est-ce que c’est parce que vous considérez que les problématiques lesbiennes sont aussi des problématiques bies ou alors que les problématiques bies nécessitent un traitement spécifique ? 

Le nom « Gouinement lundi » est venu un peu par hasard, les filles qui ont lancé l’émission ont fait un brainstorming (peut-être qu’il y a une référence à Vivement dimanche !). C’est un nom qui n’est pas inclusif mais qui est resté parce que l’émission a commencé à être connue. Maintenant il est difficile d’en changer !

En ce qui concerne les bi·e·s, on est inclusive dans le sens où les personnes bi·e·s sont mentionnées dans nos différentes émissions mais les thématiques de la bisexualité et de la biphobie n’ont jamais été abordées directement (comme on a pu le faire pour les thématiques trans par exemple). Il y a une meuf bie dans l’équipe mais Gouinement lundi est une émission surtout portée par des lesbiennes. Cependant c’est une question importante et cela sera probablement le thème d’une prochaine émission !

Comment se déroule la préparation d’une émission ? Combien de personnes font partie de l’équipe et quels sont leurs différents rôles ? Comment choisissez-vous les (chouettes) musiques que vous allez diffuser ?

On est 5 bénévoles dans l’équipe, une réalisatrice et des chroniqueuses ponctuelles pour des reportages spéciaux (comme par exemple pour un prochain reportage sur la pride de nuit à Paris). On se retrouve en début de chaque mois, chacune propose des thématiques pour la prochaine émission et on décide toutes ensemble. On se réparti les différents rôles (qui va animer, qui fait les chroniques, les reportages…) et on écrit le déroulé de l’émission dans un Google doc. On essaye toujours d’avoir au moins deux invité·e·s pour créer un moment de discussion et d’échanges pendant l’émission. Ce n’est pas forcément simple au niveau timing pour trouver des intervenant·e·s disponibles, mais Gouinement lundi est perçue comme une radio militante et les invité·e·s sont content·e·s de venir. On était super heureuses dans l’équipe que Réjane Sénac [chercheuse au CNRS et présidente de la commission parité du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes] ait accepté notre invitation pour l’émission de mars 2017 sur les présidentielles. Pour les musiques, chacune propose en fonction du thème de l’émission ; selon le thème c’est plus ou moins compliqué de trouver quelque chose de sympa et pertinent.

Photographie de certains membres de l'équipe et des invitées prise lors de la dernière émission de Gouinement lundi sur le cinéma LBT / Crédits photo : Gouinement lundi

Est ce qu’il y a une émission qui vous a particulièrement marquée ? (de part les thématiques abordées, les intervenant·e·s ou des difficultés de préparation ?)

Alors c’est difficile parce que toutes les émissions sont différentes… Mais il y en a une où j’ai pris du plaisir : celle sur la fête Nuit lesbienne, y es-tu ? où le studio était bondé avec les filles de la brigade du stupre  [collectif féministe queer, sex-positive], Rag, membre du collectif BarbieTurix et Rachel Borghi, géographe, maître de conférence à Paris IV-Sorbonne. C'était une émission hyper sympa avec beaucoup de dialogue, il y a avait une différence générationnelle entre les filles de la brigade qui sont toutes jeunes militantes (dans les 20 ans), qui ont un discours très politique et Rag de BarbieTurix qui représente davantage la fête un peu branchée et moins militante (mais heureusement que les soirées Wet for me existent!!). L’émission sur les présidentielles était géniale aussi, Réjane Sénac était super dans son discours, Chloé Delaume [autrice, a écrit Les Sorcières de la république] devait aussi venir mais elle n’a pas pu. La dernière émission sur le cinéma LBT était sympa aussi car on a passé un bon moment à écouter des extraits de films.

Quel est votre avis sur le traitement médiatique des thématiques LBT en France ?  Est-ce que ce sont de sujets mieux traités par les médias alternatifs ?

La fenêtre médiatique de visibilisation de la communauté LBT est très restreinte en France. Une fois que l’on a passé les gros événements (marche des fiertés, débats au sujet de la PMA, le mariage pour tou·te·s…), il n’y a vraiment pas grand-chose. Heureusement que des petits médias existent pour nous visibiliser ! Il y a la revue Well well well qui est un magazine à destination des lesbiennes, c’est super mais ça ne paraît qu’une fois par an (c’est une équipe de bénévoles). Il y a aussi les fanzines de collectifs comme barbieturix, la revue Terrain vague ou La rage un collectif qui crée des sérigraphies qui traitent des thématiques LBT mais ce n’est pas forcément facile de se procurer des fanzines. Ce n’est pas une diffusion grand public : tou·te·s n’y ont pas accès (par exemple si on ne fréquente pas de cercles militants…).

Globalement, il y a aussi une invisibilité des personnes LBT dans l’espace public : à Paris, à part le bar associatif La mutinerie, deux librairies spécialisées (Violette and co et Les mots à la bouche ), il n’y a pas beaucoup de lieux publics spécifiques pour les personnes LBT… Après, la visibilisation ne passe pas que par les médias ou des lieux publics, il y a aussi les festivals comme Loud & Proud, What The Fuck Fest, Jerk Off, Porn Yourself… ou les soirées, comme la Wet For Me du collectif BarbieTurix, qui créent de la visibilité mais aussi un discours, de la mise en réseau, une culture et un imaginaire qui n’existent pas sinon.

Visuels de trois émissions de Gouinement lundi Crédits images : Gouinement lundi

Avez vous des suggestions de médias alternatifs (radios, sites, blogs…) qui traitent des thématiques LBT ?

Alors, alors… Il y a bien sûr BarbieTurix qui référence beaucoup d’articles sur les thématiques lesbiennes (avec aussi des fanzines), le magazine Well well well, Têtu – qui pour le coup n’est pas du tout lesbien mais Adrien Naselli, le nouveau rédacteur en chef, est super et la nouvelle ligne directrice est bien plus inclusive qu’elle ne l’a été (iels ne parlent pas seulement des gays !). À Lyon, il y a le magazine gratuit Hétéroclite qui référence les événements gays et lesbiens de la région et qui traite de l’actualité et de la culture LGBT+. Sur le site de l’association FièrEs, il y a pas mal d’articles et de communiqués de presse sur l’actualité des luttes féministes et LBT+. Au niveau webzines, j’aime bien Les amours alternatives, le site est bien, il y a pas mal d’articles intéressants et de playlists sympa, il y a aussi le webzine Retard qui ne traite pas que des thématiques LGBT+ mais qui est chouette aussi.

Au niveau radio, il y a Le placard, diffusée sur Radio Campus Paris qui traite de la culture et de la vie quotidienne des LGBT+, iels ont de bonnes thématiques d’émissions comme « Quel vote pour les LGBT ? », « Les LGBT à l'écran » , « Quel rôle pour les médias LGBT ? « Existrans 2016 »… Leurs thématiques rejoignent pas mal celles de Gouinement lundi.

Crédits image : Gouinement lundi

Merci à Lila et à l’équipe de Gouinement Lundi d’avoir répondu à nos questions ! Vous pouvez les retrouver sur leur site, leur page Facebook , Twitter et en direct tous les 4e lundis de chaque mois (19 h-20 h 30) sur Fréquence Paris Plurielle (106.3 FM) !

Retrouvez également Gouinement Lundi le samedi 15 septembre 2018 à la Mutinerie (Paris) pour la soirée de lancement de la deuxième saison !