
Depuis le 30 décembre 2017, il est obligatoire de vacciner les enfants né·es après le 1er janvier 2018 contre 11 souches au lieu de trois jusqu’alors. Avant cette date, les vaccins obligatoires se limitaient au fameux DTP : dipthérie, tétanos, poliomyélite. Des voix se sont élevées pour protester contre cette législation. Que l’on soit foncièrement anti-vaccin, contre la législation d’un acte médical, en questionnement ou en faveur de cette initiative, que pouvons-nous retenir de ce débat ?
Jusqu’en 2018, seul le DTP était obligatoire pour inscrire son enfant en collectivité ou chez un·e professionnel·le de la petite enfance. Si l’on ne souhaitait pas faire vacciner son enfant, les seuls recours étaient (et sont toujours) une déclaration médicale d’inaptitude à la vaccination ou la scolarisation à domicile. Les vaccins contre les autres maladies infantiles étaient fortement recommandés, mais non obligatoires.
Pourquoi, donc, changer la législation en vigueur ? Pour une raison relativement simple. Afin qu’une maladie ne soit plus un danger et ne risque pas de réapparaître dans une population, l’OMS estime qu’il faut que 90 à 95 % de la population soit vaccinée (on parle de couverture vaccinale). Hors, en France, ce chiffre tourne plutôt autour des 90 % : parmi les personnes non vaccinées, nous avons celles qui ne peuvent pas recevoir le vaccin, celles qui oublient de faire des rappels – l'épidémie de rougeole que l’on observe en Nouvelle-Aquitaine, par exemple, touche principalement des personnes n’ayant reçu qu’une seule injection de ROR (rougeole, oreillons, rubéole) – et également des personnes anti-vaccins, qui refusent de recevoir des injections ou de faire vacciner leurs enfants.
Les personnes ne pouvant pas recevoir certains vaccins, ou sur lesquelles ceux-ci sont inefficaces, représentent une minorité : la plupart du temps, il s’agit de personnes immunodéprimées (dont les défenses immunitaires sont faibles voire inexistantes suite à une maladie ou à un traitement très agressif, comme une chimiothérapie par exemple) ou possédant une caractéristique génétique rare.
Disclaimer : Les personnes immunodéprimées ne peuvent recevoir de vaccins provenant de souches actives, comme celui de la rougeole. Ces vaccins contiennent en effet un organisme encore « vivant », mais qui ne peut se multiplier. Dans la plupart des cas, le corps va donc développer les anticorps nécessaires pour le supprimer sans présenter de symptômes. Une personne immunodéprimée, en revanche, ne pourra pas se défendre et va donc développer la maladie inoculée. Dans le cas de la chimiothérapie, les patient·es retrouvent des défenses immunitaires normales une fois le traitement fini et peuvent renouveler leurs vaccins.
L’un des arguments principaux contre cette loi est celui de la liberté à disposer de son corps. En effet, si l’on veut pouvoir inscrire son enfant en collectivité (et la scolarisation à domicile ne concerne qu’une infime minorité des familles), il faut obligatoirement avoir effectué ces vaccins. Hors, certains groupes comme la Ligue nationale pour la liberté des vaccinations opposent l’idée que chacun·e doit être libre de choisir ou non d’être immunisé·e contre ces maladies, et qu’il s’agit d’une ingérence de l’État dans la vie privée des individu·es. Comme on est libre de recevoir ou non des soins, on doit être libre de recevoir ou non un vaccin.
Oui, mais.
Le problème est un peu plus complexe que ça : comme on l’a vu, pour que les maladies ne se développent pas, il faut une couverture vaccinale d’au moins 95 %. Cette couverture vaccinale permet également de protéger les populations vulnérables : les nourrissons qui n’ont pas encore pu recevoir de vaccins et les personnes immunodéprimées en tête. Une personne immunodéprimée devra limiter ses sorties de peur de contracter une maladie qui pourra lui être fatale, car ses défenses immunitaires sont insuffisantes, même si elle a été vaccinée ou a contracté la maladie par le passé.
Or, les militant·es anti-vaccins s’opposent à l’obligation du vaccin ROR car il s’agirait, selon elleux, de maladies qui se soignent désormais très bien. Les connaissances scientifiques dont nous disposons sur ces maladies contredisent ces propos : ce sont des maladies qui peuvent laisser de graves séquelles, surtout à l’âge adulte, et nous reviendrons plus loin sur le cas de la rougeole. Et si, effectivement, une personne en bonne santé générale pourra s’en sortir, une personne immunodéprimée qui contracte la rougeole est pratiquement condamnée.
Donc, le choix de se faire vacciner ou non ne regarde pas que soi : c’est un acte social, qui protège sa propre personne et les autres. Rendre la vaccination obligatoire est donc une mesure de santé publique : à la différence du soin individuel, la santé publique vise à protéger la santé de l’ensemble de la population.
Les anti-vaccins, ou « anti-vax », ne sont pas uniquement contre l’obligation de se faire vacciner, mais contre la vaccination dans son ensemble. Plusieurs arguments reviennent souvent :
Les polémiques sur les vaccins existent depuis leur apparition. On ne peut pas nier qu’ils ont participé à supprimer des maladies qui faisaient jusqu’alors des ravages : diphtérie, polio… La question de la liberté individuelle, du choix d’être vacciné·e ou non, est épineuse : ce choix implique également notre entourage, celui de nos enfants si nous en avons. Il s’agit d’un problème éthique encore étudié, et les politiques varient d’une pays à l’autre, allant d’une grande liberté à une obligation complète. Le but de cet article est principalement de dénoncer les fausses informations qui peuvent circuler et de donner à chacun·e les informations nécessaires pour faire un choix éclairé.